Analyse du texte «De la pyramide au réseau?»

DRT 7002, prof. Louise Rolland, Hiver 2010, Université de Montréal
Dans le texte de F. OST et M. Van de Kerchove (De la pyramide au réseau? – Pour une théorie dialectique du droit, Publications des Facultés universitaires Saint-Louis, Bruxelles, 2002), les auteurs font état d’une « révolution scientifique » au sens où l’emploie Kuhn : un nouveau paradigme –le réseau—tend à remplacer le paradigme jusque-là dominant –la pyramide.
Quels sont les effets de ce changement de paradigme ?
• Sur l’ontologie du droit (qu’est-ce que le droit?) ?
• Sur l’épistémologie du droit (comment connaît-on le droit?) ?
Pour chacun de paradigmes, quels sont :
• Les postulats (les présupposés) ?
• Les concepts dominants ?
• Les questions de recherche ?
• Les hypothèses générales de recherche ?

Quels sont les effets de ce changement de paradigme :
• Sur l’ontologie du droit (qu’est-ce que le droit?) ?

(p. 14) «Avec le réseau, l’État cesse d’être le foyer unique de la souveraineté (celle-ci ne se déploie pas seulement à d’autres échelles entre pouvoirs publics infra et supra-étatiques, elle se redistribue également entre de puissants pouvoirs privés); la volonté du législateur cesse d’être reçue comme un dogme (on ne l’admet plus que sous conditions, qu’au terme de procédures complexes d’évaluation tant en amont qu’en aval de l’édiction des lois); les frontières du fait et du droit se brouillent; les pouvoirs interagissent (les juges deviennent co-auteurs de la loi et des subdélégations du pouvoir normatif, en principe interdites, se multiplient); les systèmes juridiques (et, plus largement, les systèmes normatifs) s’enchevêtrent; la connaissance du droit, qui revendiquait hier sa pureté méthodologique (mono-disciplinarité) se décline aujourd’hui sur le mode interdisciplinaire et résulte plus de l’expérience contextualisé (learning process) que d’axiomes à priori ; la justice, enfin, que le modèle pyramidal entendait ramener aux hiérarchies de valeurs fixées dans la loi, s’appréhende aujourd’hui en termes de balances d’intérêt et d’équilibrations de valeurs aussi diverses que variables.

• Sur l’épistémologie du droit (comment connaît-on le droit?) ?
Trois anomalies s’observent actuellement : (1) les «hiérarchies enchevêtrées» ; (2) les «objets juridiques non-identifiés» («autorités administratives indépendantes») ; et (3) multiplication des concepts hybrides : souverainetés «partagées» ou «relatives», citoyennetés multiples ou «fragmentées», validité conditionnelle et provisoirenormes juridiques, rationalité «limitée».
Ces anomalies mènent à un questionnement de la conception hiérarchique des sources du droit et tend à le concevoir en réseau.

Pour chacun de paradigmes [le modèle pyramidal (hiérarchique) et le modèle en réseau], quels sont :

• Les postulats (les présupposés) ?
PYRAMIDAL :

(p. 18) «le modèle pyramidal repose sur une ontologie substantialiste et mécaniciste, ainsi que sur une métaphysique du sujet : le monde simple et mécanique, centré sur la figure de l’individu, le monde de la rationalité occidentale moderne dont Hobbes et descartes constituent deux représentants éminents»

RÉSEAU :

(p. 18) «le modèle du réseau relève, quant à lui, d’une ontologie relationnelle et cybernétique, liée à une pragmatique de l’intersubjectivité et de la communication : monde complexe et récursif de l’interactivité généralisée dont in commence seulement à découvrir la grammaire.»

• Les concepts dominants ?
PYRAMIDAL : Réglementation (positivisme) par le Gouvernement (État)
RÉSEAU : Régulation (codes volontaires; standardisation; bonne conduite et pratiques; éthique…) par la gouvernance (selon l’autorité… pouvoir?; la consultation des concernés)

• Les questions de recherche ?

Réglementation vers la Régulation (voir p.28) :

  • «Ne continue-t-on pas encore à postuler un régulateur central capable de maintenir en équilibre un système, lui-même nettement distingué de son environnement?»
  • «Est-on certain que l’on puisse toujours prêter aux pouvoirs publics, aussi stratèges soient-ils, des desseins aussi clairs, et surtout la capacité de les réaliser?»

Gouvernement vers la gouvernance (voir p. 30-32) :

  • Spécificité du politique («Que reste-t-il de l’impérium d’un État qui se fait animateur ou stratège?»)
  • Mécanismes de coordination horizontale et de «gouvernementalité» («comment, en l’absence d’un régulateur central, penser néamoins une action collective dotée d’un minimum d’institutionnalisation et de cohérence?»)
  • Légitimité (que deviennent les garanties de l’État de droit?)

• Les hypothèses générales de recherche ?
La dialectique entre les théories de la pyramide et le réseau est la meilleure façon d’explorer cette question.

La pensée dialectique résiste à cet embrigadement réducteur [de choisir l’un camp ou l’autre] et invite à un changement de regard : et si la vérité tenait dans la tension des deux pôles (plutôt que dans le choix de l’un ou de l’autre), dans leur solidarité conflictuelle et leur intime articulation – comme si, à raison même de leur opposition, ils tentaient ensemble de dire quelque chose de la colplexité d’un réel qui ne se réduit ni à ;’un ni à l’autre ? (p. 37)

Par ailleurs, les auteurs posent que l’«interaction entre les trois pôles de la validité (légalité, effectivité, légitimité)» relève d’une considération qui anime leur travail.

Ce contenu a été mis à jour le 2010-01-11 à 11 h 03 min.