Notes de la plénière de Caroline Bassett à #DHN2018

Caroline Bassett a présenté la conférence d’ouverture de la dernière journée de #DHN.

Elle approche les humanités numériques par la perspective des « media studies » et, tout particulièrement, sa propre expérience de la culture indigeste – à ses yeux – de la culture « pre-hippie » des laboratoires d’Apple Computers lors d’une visite à titre de journaliste scientifique (ses mots, à peu près: « indigestibility of pre-hippie tech culture of apple labs »). De plus, l’information oublie (« information is forgetful ») – puisque l’industrie nous revend à perpétuité ce qui est nouveau.

Sous le thème de l’utopie technologique et de ses promesses, et, surtout, Bassett se distance des approches pessimistes de Adorno et Bleach, qui précisent que la technologie déçoit invariablement puisqu’elle s’articule à l’extérieur du cadre de notre propre espace temps (analogie du voyage). Bassett désire explorer une relation plus tenue entre la technologies et l’utopie – essentiellement afin de permettre l’émergence de plusieurs utopies.

Bassett identifie trois époques d’utopies dans l’ère contemporaine de l’information.

I. « Freedom claims 1984 »

Citant le moment charnière de la diffusion de la publicité de Apple computers en 1984, Bassett identifie un nouveau chapitre dans la manière de réfléchir à l’information.

II. 1990 et le boom d’Internet

Citant spécifiquement la couverture de Wired Magazine qui présente Pain, the théoricien britannique du 19e siècle, et qui identifie Marshall Mcluhan comme son apôtre, Bassett repasse certains moments de la découverte du cyberespace (vous souvenez-vous de la déclaration d’indépendance de J. C. Barlow?). Bassett propose deux visions de l’utopie à cette époque.

1. Utopie vue selon Wired Magazine et Sillicon Valley: la foi inébranlable (fataliste) envers la technologie et les marchés… et espérant vivre la singularité.

2. Un pessimisme assumé de l’Europe, que Bassett nuance grâce à Eagleton. Ce dernier distingue entre l’esport et l’optimisme, un espace qui permet d’entrevoir le futur. L’espoir embrasse l’incertitude radicale tandis que l’optimisme évoque la certitude du progrès (approche lié à Walter Benjamin). La vision de Eaglon, sans être pessimiste, permet une critique du progrès.

Les natifs du numérique vivent un désillusionnement envers le numérique en partie lié à l’échec de cet optimisme, espoir et foi…

III. Aujourd’hui: l’anti-informatique (anti-computing)

« Que s’est-il passé à l’utopie?  » demande Bassett. Nous sommes un peu déçu. L’école anti-utopique identifie l’emphase de notre société pour le contrôle, la sécurité, la satisfaction au lieu des plans normatif des humanités… nous sommes dans une société utilitariste à la Bentham. Les alternatives sont l’accélérationisme, qui positionne la rapidité croissante à une utopie par incréments, ou une vision de l’utopie reformée par l’espoir comme réponse à la dystopie apocalyptique.

Conclusion: anti-cologie ou, est-ce que l’utopie nous a coûté la terre?

Historiquement, surtout du point de vue de l’hégémonie de l’ouest politique, l’utopie est liée au vol de terres et au positivisme qui s’arrogent le temps et l’espace. Bassett cite Bruno Latour qui a déjà appelé à délaisser la mondialisation techno-économique ainsi que le nationalisme pour favoriser une nouvelle vision de « soins ». Barrett cite aussi la figure du Cyborg de Donna Harroway, surtout l’idée qu’il y a de la joie dans l’infidélité et que l’homme et l’outil ne font pas l’histoire humaine. Si Harroway précise qu’il faut être dans le trouble (stay in trouble), Basset dit: faites le trouble (make trouble).

Ce contenu a été mis à jour le 2018-03-09 à 9 h 41 min.